# 7 | Dépister avec la taxonomie SOLO
Diagnostiquer la structure des résultats d'apprentissage
J'ai découvert il y a quelques années un outil qui a profondément transformé ma pratique d’évaluation et qui a eu un impact majeur sur ma pédagogie explicite : la taxonomie SOLO (Structure of Observed Learning Outcomes) qui s'est révélée être un instrument remarquablement efficace pour évaluer les résultats d'apprentissage de mes élèves.
Dans leur ouvrage « Evaluating the Quality of Learning : The SOLO Taxonomy », Biggs et Collis explorent en profondeur comment cette taxonomie peut être appliquée dans divers domaines d'enseignement. Mais ils soulèvent d’abord la difficulté de l’évaluation qualitative :
La domination écrasante de l'évaluation quantitative est assez évidente quand on regarde l'utilisation des tests à choix multiples. On oublie souvent, cependant, qu'une grande partie de la notation des dissertations est tout aussi quantitative en théorie, bien que moins sophistiquée en pratique. La procédure presque universelle dans la notation des réponses ouvertes, comme les dissertations, consiste à attribuer une note pour chaque point pertinent évoqué, à convertir le ratio des notes réelles par rapport aux notes possibles en une sorte de nombre, et à ajuster pour la «qualité» globale. D'une manière ou d'une autre, ce résultat est converti en une note finale ; soit une note lettrée «A», «B» ou «D» ; ou «Réussite», «Échec», «Distinction», etc.
Bien que tout le monde s'accorde à dire que l'évaluation qualitative est importante, elle est généralement faite en termes assez subjectifs qui sont rarement explicités au bénéfice de l'étudiant et incorporés dans la note finale au moyen d'un calcul tout aussi privé. Même dans la notation des dissertations, donc, le «combien» tend à dicter la mélodie de la notation plus que le «à quel point».
Biggs & Collis, Evaluating the Quality of Learning, p. 4
Dans ma pratique, j'ai adapté cette taxonomie en utilisant un système de notation par lettres : IDME (Incomplet ou insuffissant, Développement, Maîtrisé, Étendu ou enrichi). Cette approche me permet de fournir une rétroaction claire et spécifique à mes élèves, tout en évitant d'attribuer une note chiffrée à un état qui est par nature dynamique.
L'utilisation de la taxonomie SOLO dans mon enseignement explicite de la littérature me rend de grands services. Elle est un outil efficace pour apprécier la compréhension de l'élève, basée sur des éléments observables dans son texte, et éventuellement dépister des difficultés d’apprentissage. à travers le portfolio, elle permet de suivre la progression de l'élève dans sa maîtrise des compétences en littératie. Cette taxonomie s'harmonise très bien avec les principes de l'enseignement explicite et de l'enseignement de la lecture littéraire au collégial (ELLAC).
En observant les éléments dans les productions des élèves, je peux non seulement identifier leur niveau de compréhension actuel, mais aussi guider leur progression vers des niveaux de réflexion plus complexes. Cette approche permet une évaluation plus fine et une rétroaction plus ciblée, facilitant ainsi l'apprentissage et le développement des compétences en analyse littéraire, tout en encourageant une réflexion critique.
Diagnostic des blocages
Au-delà de sa fonction descriptive, la taxonomie SOLO offre aussi un cadre précieux pour comprendre les difficultés d'apprentissage. Mon expérimentation avec le monitorage des apprentissages a révélé que la progression d'un niveau à l'autre n'est ni automatique ni linéaire : des blocages peuvent survenir lorsque certaines habiletés ne se développent pas harmonieusement.
Par exemple, un blocage au niveau unistructurel indique souvent une difficulté fondamentale à établir des connexions entre différents éléments. L'élève peut exceller à identifier un aspect unique, mais peine à élargir sa perspective. De même, la stagnation au niveau multistructurel, malgré la capacité à repérer plusieurs éléments pertinents, révèle souvent une difficulté à synthétiser ces éléments en un tout cohérent.
En permettant d'identifier précisément où se situe le blocage dans la progression, cet outil facilite des interventions pédagogiques ciblées. Cette fonction diagnostique en fait un outil précieux pour un accompagnement différencié.
Bref, la taxonomie SOLO s'est révélée être un outil très précieux. Elle m'aide à guider mes élèves vers des niveaux de compréhension plus profonds et plus complexes, tout en leur offrant un cadre clair pour comprendre et améliorer leur propre processus d'apprentissage.
Dans une autre chronique, nous verrons comment, à partir de la taxonomie SOLO, il est possible de dépister des difficultés d’apprentissage et de dénouer des blocages dans la progression de l’élève.
[Publié le 12 novembre 2024 | révisé le 31 décembre 2024]
Références
BIGGS, John B. & Kevin F. Collis (1982), Evaluating the Quality of Learning ; The SOLO Taxonomy (Structure of the Observed Learning Outcome). Elsevier Inc.
J. Hattie & G. C. R. Yates (2020), L'apprentissage visible - ce que la science sait sur l'apprentissage. ERPI.
La taxonomie SOLO et l’alignement constructif, par Didier Goudeseune